jeudi 18 août 2016

[Chapitre 14] Au nom de l'amitié internationale

Almaty est finalement bien plus plaisante que l'image qu'elle nous avait donnée à l'arrivée. Vastes espaces verts, urbanisme ordonné, restos variés et stylés. Après avoir arpenté la ville dans tous les sens, il nous brûle d'en visiter les environs.
 
Le Kazakhstan constitue l'un des foyers d'émergence de l'Homme, et ce dès l'âge de pierre. Le site de Tamgaly, classé au Patrimoine Mondial de l'UNESCO, présente des vestiges fondamentaux de la période. Les fouilles archéologiques ont permis de mettre au jour des outils et céramiques, ainsi qu'un vaste site de pétroglyphes datant de l'âge de bronze (8000 ans avant notre ère).
Ni une ni deux, il nous faut trouver un moyen d'y aller. Nous demandons à notre Hostel si on peut trouver une excursion pour la journée. Tractations sans fin. Tarif exorbitant, négociations. Le prix est toujours trop haut, on décide de tirer un trait sur les pétroglyphes et de se débrouiller pour aller dans la montagne en bus. Puis le chauffeur rappel, le prix passe de 120$ par personne, à 70 puis à 50. Allons-y alors!
Départ à 9:00, pour une virée un peu différente de ce que nous envisageons.
Le chauffeur n'est pas spécialement loquasse, il est même carrément...bizarre. On fera avec hein!
 
La sortie d'Almaty est polluée et puante. La banlieue est émaillée de casinos clinquants perdus dans des terrains vagues. L'autoroute rutilante est en cours de construction, les véhicules se croisent d'un côté de la chaussée de façon complètement anarchique, doublent les yeux fermés guidés par les coups de klaxons de ceux qui viennent en face. A priori ça passe...
 
Tamgaly Tas. Première surprise, ce n'est pas le site UNESCO auquel nous pensions, mais un site homonyme de pétroglyphes bouddhistes du XVIII ème siècle... Ce n'est quand même pas de la même trempe. Deuxième surprise, il faut y aller le soir, lorsque la lumière rase les roches rouges. Le reste de la journée on n'y voit rien, pas de bol. Troisième surprise, le terrain est infesté de moucherons qui s'immiscent partout. Super... on va faire avec !
 
Le tour du site est assez rapide. Pour autant, il n'est pas dénué d'intérêt. On y trouve des Bouddha et des textes de mantras, signes évidents de la mobilité des hommes et des idées dans la région. Nous avançons entre les roches, à la recherche de trésors cachés des regards trop pressés. Des hommes se baignent dans la rivière en contre bas.
 
L'un d'eux vient à notre rencontre et nous explique en russe quelques infos logistiques sur le lieu, notamment qu'on a fait le tour. Plus loin il n'y a plus rien. Le bonhomme est sympa, il a le regard jovial et la bedaine rebondie dans son caleçon bleu trempé. A vue de nez, il sent un peu la vodka. Allez savoir pourquoi, il semble conquis par les yeux bleus de Justine.
 
- Davaitsé pa pmavaiem!
(Allez, on va nager?)
 
Justine :
- Niet. Ou minia nié... maillot de bain
(Oh bah non, malheureusement j'ai pas mon maillot de bain)
 
- Nié nada! ...
(Mais y'a pas besoin, tu peux y aller comme ça - sous-entendu en sous-vêtements). Et puis notre nouveau copain insiste, il aimerait bien qu'on aille patauger avec lui!
 
- Skolka tibia liet?
(Tu as quel âge?)
 
- 32!
- Ya 35 liet!
(Moi j'ai 35 ans!) - oula, il fait plus quand même... Et va qu'on se tape sur le ventre, c'est dingue tous nos points communs d'un coup!
 
- Davai, foto!
 (Allez, photos!)
 
Je prends l'appareil de Justine, afin d'immortaliser la bonne humeur de notre nouveau copain. Tactile d'ailleurs le nouveau copain. Il attrape notre Justine par la taille, je m'apprête à dégainer l'appareil photo et .... il la prend dans ses bras dans un porté...surprise! Grand moment de rires.
Et voilà qu'il veut m'en faire autant. Ah non non, pas question! J'esquive comme je peux, et je m'en sors bien.
 
- Tchai? Piat minutes!
(Vous avez bien cinq minutes pour prendre un thé?)
 
Pourquoi pas... On pensait faire une pleine journée archéologique, on a fait le tour en une demi-heure. Alors on a bien cinq minutes pour un thé!
 
Les hommes sont tous sortis de l'eau. On se retrouve à l'ombre d'une tonnelle, devant une table pleine de pique-nique.
- Ti pioch vodka?
(Je te sers un verre de vodka?)
 
C'est vraiment sympa de nous proposer de trinquer à l'amitié internationale, mais vraiment, la vodka, c'est pas possible. L'un d'entre eux apporte une bouteille de coca, neuve et fraîche. Il nous dégote deux gobelets qui semblent propres. Va pour du coca. Ça doit pouvoir renforcer l'amitié entre les peuples quand même.
 
Nouvelle séance photo, avec à peu près les appareils de tous nos nouveaux copains. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils ont le contact facile. On se serre sur le petit banc, collé serré et les mains sur la taille. Justement, là, la main qui glisse jusqu'à la hanche, ce n'est pas obligatoire hein! Et le petit bisou pour la photo, c'est pas indispensable.
 
- Tu jenat?
(Tu es mariée?)
 
Ah tiens, d'un coup, j'ai l'impression que c'est le moment d'avoir un mari aimant en France. S'en suit à peu près la discussion suivante :
 
- Mais alors si tu es mariée, pourquoi t'as pas d'enfants ?
- Chaque chose en son temps hein! On garde ça pour plus tard
- C'est prévu pour quand?
(Oh quelle est bonne cette question!)
- Quand? Pas tout de suite! D'abord un travail, une maison, une voiture et après les enfants
- Au Kazakhstan, c'est dans l'autre sens. D'abord les enfants, puis la maison et la voiture!!
 
Allez, c'est reparti pour les photos. Pas si près la main là, on se connait pas assez! Moi qui suis déjà pas la fille la plus tactile de la terre, alors là je suis aux anges. D'ailleurs, réflexion faite, j'ai l'air un brin crispée sur les photos!
 
- Astarojna, Justine muj : baltchoi
(Attention, le mari de Justine il est du genre baraqué. Si j'étais toi je ne m'y frotterais pas - petite pensée pour Yoann!)
 
- Ah bah ca veut dire que le tien il est tout maigre?
Et hop, nouvelle étreinte. Ils sont gentils mais un peu collants nos nouveaux copains.
 
Bon allez, avec tout ça, je crois que c'est l'heure de repartir hein! On a œuvré pour la fluidité des relations internationales, on aurait pu trouver chacune un mari sur place. Malheureusement pour eux, les nôtres attendent en France. Enfin, on se comprend hein!
 
Retour mouvementé avec notre chauffeur. C'est dingue comme il a du mal a faire UNE UNIQUE chose à la fois. Ce serait cool que tu te concentres sur la route, plutôt que de retirer les fils de ta casquette pour en faire du fil dentaire! Et le stylo, pour te gratouiller l'oreille, ce n'est pas obligatoire. D'ailleurs regarde la route, c'est mieux.
 
Pfiou, quelle journée...

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