Nous avons posé nos sacs à Osh, dans la vallée du Ferghana.
Deuxième ville du pays, aux frontières avec la Tadjikistan et l'Ouzbekistan.
La ville est tristement célèbre pour avoir fait l'objet de
massacres inter ethniques en 1990 puis 2010. Depuis, la situation semble
stabilisée, mais pour combien de temps?
Nous sentons que nous pénétrons dans un autre Kirghizistan.
Le relief est différent, plus plat. Les populations sont sédentaires, les
villes sont plus denses. Il y a des magasins, des parcs, les gens se promènent
dans les rues. La ville d'Och est à l'image de ce qu'on appelle
"ville" chez nous. Plus encore, le type ethnique des populations est
plus bigarré. Et pour cause!
Lorsque Staline a dessiné les contours des provinces de
l'URSS d'alors, il a pris le soin de tracer, volontairement, des frontières
coupant au travers des territoires ethniques. Diviser pour mieux régner, et
démontrer par les faits qu'un pouvoir fort et centralisé est le meilleur remède
aux divergences de mode de vie. La dentelle des frontières est on ne peut plus
toxique. Les frontières du Kirghizistan viennent traverser des territoires
ouzbèkes et tadjiks, et réciproquement dans chaque pays voisin. Pire encore, il
y a au sein même du Kirghizistan deux enclaves ouzbèkes et une enclave tadjik,
situées sur les seules routes accessibles toute l'année. Les voies intra-nationales
passent par des cols d'altitude fermés une partie de l'année. Et quand bien
même ils sont ouverts, c'est au prix d'un trajet long et tortueux à travers la
montagne. Pas surprenant que des tensions apparaissent régulièrement dans la
région.
Le bazar d'Och est un savant mélange de ces différentes cultures.
À lui seul, il respire la diversité. On y trouve de tout, et plus encore. Dans
une atmosphère chamarrée, les marchands achètent et vendent tout ce qui peut
l'être. Pour la première fois depuis le début du séjour, nous retrouvons
l'atmosphère de l'Asie Centrale.
Ici nous distinguons clairement la mosaïque ethnique des
populations. Les femmes ouzbèkes portent des robes longues et colorées, ainsi
qu'un fichu dans les cheveux. Certaines sont voilées, une poignée arbore le
Niqab. Les coiffes des hommes sont reconnaissables. Les kirghizes ont un haut
chapeau brodé, appelé Kalpak. Les ouzbèkes et les tadjiks portent de petites
calottes rondes.
Les modes de vie sont également différents. Les ouzbèkes
sont de tradition sédentaire. Ils œuvrent à construire une maison pour chacun
de leurs fils. Quant aux kirghizes, nomades, ils vivent en prévoyant la saison
prochaine. Ici aujourd'hui, demain ailleurs. Pour cette raison, les villes sont
mieux établies dans cette région.
N'oublions pas les populations russes, restées coincées dans
ces frontières à la chute de l'Union Soviétique. Des femmes blondes,
longilignes, et souvent habillées court et moderne.
Gageons qu'ensemble, ils continuent à contribuer
pacifiquement à la richesse du pays. Pas si simple dans une région qui accumule
les difficultés économiques...
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