samedi 2 janvier 2016

[Chapitre 9] L’autre visage de Dakar

Dakar, la poussiéreuse. Les rares tronçons goudronnés sont bien vite recouverts de sable rouge. Les rues sont un entrelas de pistes chaotiques, de nids de poules tellement profonds que les voilà emplis d'eau de pluie.

J'ai déménagé au bord de l'océan, en face d'une longue bande de sable fin. L'odeur des embruns est masquée par le parfum âcre des ordures en décomposition. Des montagnes d'immondices s'accumulent sans qu'elles ne semblent déranger les passants ou les habitants du quartier. Les gosses jouent pieds nus, traversent ces décharges à ciel ouvert pour rejoindre ma plage. Plus loin, les chèvres trouvent leur bonheur dans ce capharnaüm de victuailles putréfiées.
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Les quartiers à demi construits côtoient ceux à moitié achevés. L'industrie du parpaing est reine, il lui manque le prince  "crépis". Malgré une impression de zone abandonnée, les quartiers sont pleins de vie. Ici une épicerie, là un tailleur. Plus loin une boucherie, une pharmacie et un ébéniste. La construction urbaine prend un sens vraiment loin de celui qui m'est familier. Tout semble anarchie. Je suis partagée entre le dégoût de tant de paupérisation et la curiosité de comprendre comment ces habitats sont structurés...
Et puis j'ai découvert "l'autre Dakar". Celui structuré et organisé, bitumé et propret. Le centre-ville ressemble à toute mégalopole : de larges artères surpeuplées aux heures de pointes, des buildings accueillant les sièges ultramodernes de grands groupes internationaux, des centres commerciaux, des hôpitaux de pointe...

Nous faisons la connaissance de Mariama, une ancienne du Turkménistan, rentrée travailler dans son pays d'origine. Nous nous sommes loupées à quelques jours près dans la lointaine Ashgabat, mais j'ai beaucoup entendu parler d'elle. Elle vient nous chercher, Aurélie et moi, au pied de notre hôtel. Avec son mari, elle va nous faire découvrir un autre visage de Dakar. Dans leur voiture climatisée, nous traversons la ville jusqu'à la Corniche, surplombant l'océan. Nous discutons longuement du Turkménistan et de cette effarante vie d'avant, mais aussi de leur vie ici, au pays.


Bientôt nous passons devant de superbes villas, flirtant sans décence avec des dizaines de millions de francs CFA. Dernier visage de Dakar, celui des propriétaires plus riches que je ne le serai jamais... Nous n'aborderons pas ici la façon dont tant de fonds ont pu être collectés. Les scandales ont suffisamment nourris les actualités...

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