samedi 2 janvier 2016

[Chapitre 8] Contre mauvaise fortune…

Ainsi va l'Afrique...

"P*****, fais pas comme si tu découvrais que ça ne marche pas!!". Haah!! Je les maudits, ces Sénégalais qui donnent un air faussement surpris devant un dysfonctionnement qu'ils connaissaient pourtant! Ibrahima et ses essuis glace, le chauffeur de clandos et sa vitre qui ne remonte pas, et maintenant le gérant de l'hôtel qui " découvre" la fuite de ma chasse d'eau! Va-t-il y en avoir encore beaucoup d'autre comme ça?
Ce soir (*) tout m'agace, tout m'irrite.

Fin de la formation de l'association des femmes en charge du nettoiement des plages. On convient des horaires pour le lendemain. On s'accorde sur 9:00. Elles plaisantent ensemble. Je comprends, dans leur wolof, "9:00 sénégalaise". Ah oui, évidement, moi je raisonne en heure française. Après traduction ce sera 9:30... Je préfère en rire. Les précédentes formations, l'heure sénégalaise m'avait fait attendre jusqu'à 11:00... Allez, prenons ça avec le sourire!
Lorsque j'ai repris cette boutade avec les maraîchers, mon troisième groupe de stagiaires, ils m'ont rappelé la devise sur le fronton de leurs écoles : " L'heure c'est l'heure. Après l'heure, ce n'est plus l'heure. Avant l'heure, ce n'est pas encore l'heure", avant de me rappeler que l'heure est universelle. Ils conviendront tout de même qu'ils ont un problème avec la ponctualité !

J'ai pris mes quartiers à la lisière du village de petit Mbao, dans la Maison des Amis de la Nature. Ce foyer pour les visiteurs était somme toute très correct, mais située au fin fond de nulle part, avec pour seul compagnon le gardien et les moustiques. Rassure toi, lecteur : le pays présente peu de dangers, que les gens veillent les uns sur les autres et que le climat est assez quiet. Et puis j'avais amené de quoi bouquiner! Ajoutons à cela que le resto borgne à proximité ne m'inspire guère... Je compte sur la fin des formations à Keur Massar, village à proximité, pour amorcer une fuite organisée. C'est le moment opportun pour déménager dans un hôtel à Dakar même! De plus, Aurélie me rejoints mercredi soir. Double effet d'aubaine!
Mais pourquoi donc avoir trouvé un logement à Tatayou les Oies? Je commence à comprendre Ibrahima... Planète urgence vient en appui à des projets locaux, en mettant en contact des volontaires, venus avec leurs compétences, et des associations locales. Il n'y a pas de subventions, pas de subside financier, pas de don direct. C'est un échange de connaissances. Un moyen sain, selon moi, de cesser la mise sous perfusion des pays en développement, dérives de décennies d'ONG, au profit d'un partenariat de travail.
Mais le partenaire local ne voit pas tout a fait les choses sous cet angle! J'ai compris qu'il rogne sur tous les postes pour dégager un petit profit, notamment le logement! À priori, ce n'est pas pour glisser les quelques milliers de francs dans sa poche, mais plutôt pour en faire profiter l'association. Le hic, c'est que ça ne rentre pas du tout dans le partenariat avec Planet Urgence...

Et la petite Marine dans tout cela? Heureusement, Romain, le correspondant de PU n'est jamais vraiment loin. Après avoir longuement échangé ensemble, nous avons recadré quelques points. C'est la première fois qu'il travaille avec Ibrahima. J'ai comme l'impression qu'il y aura un peu de travail pour s'accorder pour la suite! Nous convenons que je termine au mieux les formations. Je mise tout sur mon esprit positif et constructif, sur ma bonne humeur et mon entrain! Quoi qu'il en soit, je sais que le renforcement des capacités pour lequel j'ai œuvré sur ces 10 jours ne sera pas vain. Je vois dans le regard de ces femmes des idées qui s'éclairent, des solutions qui s'animent. C'est une ouverture possible vers un avenir meilleur, vers des perspectives différentes. Peut-être pourront-elles dégager une petite activité génératrice de revenu et améliorer le quotidien.
Cette jeune fille, étudiante en gestion, met du sens sur ses courts parfois abstraits. Sur un exercice un peu compliqué, la voilà qui aide les femmes moins érudites qu'elles. Il y a cette femme, qui projette d'acheter des chaussures fabriquées artisanalement dans un village du pays pour les revendre à la paire ici. Elle adapte immédiatement mes exemples sur son cas concret, m'interroge sur tous les coûts à prendre en compte et sur le bénéfice qu'elle pourra dégager. Son projet tient ma route. C'est le début d'une nouvelle voie... Le Sénégal se construit ainsi. Mais la route est encore longue.

Une goutte d'eau dans l'océan... Pourtant le pays ne manque pas de ressources! Les bonnes volontés sont légion, les formations sont de qualité. Au fil des jours j'apprends à connaître ce pays. Petit à petit, je comprends quelques ficelles. Si peu... Une goutte d'eau dans l'océan...


(*) mardi 29 septembre

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