samedi 2 janvier 2016

[Chapitre 11] lorsque soudain…

Cette fois c'est fini. Ma mission de congés solidaires touche à sa fin. Pour autant, l'aventure continue, pour une dernière semaine de découverte du pays.

Je boucle mon sac à dos. Samedi 3 octobre, 5h45. Le réveil sonne. Une longue route nous attend. Nous mettons le cap sur la région du Sine Saloum, à environ 200km de Dakar. Nous nous apprêtons à découvrir de vastes paysages, faits de mangroves, de savanes et de larges étendues sauvages. Avant tout cela, il nous reste un trajet rocambolesque.

6h15, nous sautons dans un taxi. Arrivées à la gare routière de Baux Maraîchers, nous suivons le flot humain qui se dirige vers un espace couvert et animé. Un homme nous indique d'avancer pour atteindre le point de départ des Sept-Places à destination de Toubacouta. Nous découvrons le type de véhicule qui devrait nous conduire, Inch Allah, à bon port. Il s'agit de vieille 505 break, avachies et fatiguées. Pourtant, force est de constater que ça roule ! Comme leur nom l'indique, elles transportent 7 passagers + le conducteur. Il reste 2 places dans le véhicule, prêt au départ. Elles sont à l'arrière, là où les sièges sont les plus inconfortables! Nous attendrons le suivant. Le véhicule est plein, il s'élance dans un nuage noir de pollution.
Nous nous serrons dans la 505 suivante. Le placeur a gardé les meilleures places pour les Toubabs que nous sommes, comprenez les étrangères. Nous ferons route avec une famille gambienne. Nous reconnaissons leur Wolof teinté de mots anglais. C'est parti!


La voiture s'élance lentement sur la route qui tourne le dos à Dakar. Je salue au passage la Maison des Amis de la Nature. Les heures s'égrainent aussi vite que le permet la chaussée inégalement bitumée, faite de creux, de bosses et parfois d'un goudron impeccable.
Le conducteur pilote prudemment mais efficacement. Je jette un œil au compteur à bout de souffle. Il flirt difficilement avec les 70km/h. À ce rythme, on n'est pas encore arrivées... Les paupières lourdes, je m'abandonne chaotiquement dans les bras de Morphée. Les soubresauts du véhicule me tirent d'un trop léger assoupissement. Soudain, 3 cochons s'avancent sur la chaussée. Vous ici? Quelle surprise! En terre d'Islam? Etes-vous perdus?? Au fil de quelques discussions, nous apprendrons que cette viande n'est pas prisée que des chrétiens, mais aussi des "musulmans de gauche" ! Sourire...
Nouvelle étreinte avec mes songes, bousculée par la piste qui se désagrège progressivement.

Le véhicule s'immobilise, dans un entrelacs d'effluves nauséabonds : celles des déchets de poissons qui pourrissent au soleil. Nous sommes face à la localité de Foudiougne. Pour l'atteindre, il faut faire la queue et monter dans le bac qui conduit sur l'autre rive. Cette fois, nous sommes bien dans le delta du Sine-Saloum. L'attente est interminable. Il fait une chaleur de plomb. Pas un seul coin d'ombre. Les piétons tuent le temps assis sur les murets ou de part et d'autre de la chaussée.

Lorsque soudain... Une vieille Renault sortie de nulle part s'enfonce à une vitesse folle sur la voie circulable. Tout va très vite. Le bolide cramoisi, les cris, le bruit sourd du choc, le silence abattu, l'indignation. Les badauds pestent, accusent, défient celui qui ose conduire sans frein au risque d'ôter la vie, celui qui a eu l'inconscience de poursuivre sur la route alors qu'il aurait pu faire du delta sa voie de garage, pour venir s'échouer sans heurts dans la vase du Saloum. Un peu plus loin, des hommes viennent au secours de celui qui a été percuté. Le pauvre bougre se tient difficilement debout, blessé au bras et à la jambe. Mais vivant. En état de choc. Plus tard, nous retrouverons le véhicule sur la grève, immobilisé par un tas de gravier. Son conducteur, en plein palabres avec les autorités, devra s'expliquer. Nous n'aurons pas la suite. Après trois heures d'attente, nous montons enfin dans le bac.


Parce que le trajet est un voyage en soi... Au terme de 11h00 de route, nous avons épuisé 6 moyens de locomotion différents : taxi, "Sept-Places", bac, moto, pirogue et enfin charette à âne. Nous posons nos sacs sur l'aire marine protégée du Bamboung. Nous sommes très loin du tumulte de Dakar...

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